Gros fumeur et buveur, il est devenu coureur pro
Il était une fois Yoann Stuck. Un jeune homme de 26 ans, qui pèse 90 kilos, qui ne pratique presque aucune activité sportive. En dehors de son emploi, Yoann mange beaucoup, fait « la fête tous les soirs »et fume « plus d’un paquet par jour ».
Sept ans plus tard, en 2017, Yoann Stuck n’est plus la même personne : il pèse vingt kilos de moins et il est devenu traileur professionnel. Cinquième français du championnat de France 100K cette année, Yoann Stuck est aussi arrivé deuxième de l’Eco-Trail de Paris 2015, une course de 80 kilomètres avec 1 500 mètres de dénivelé. En 2014, il a aussi terminé 17e de la prestigieuse course CCC de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc, sur 101 kilomètres.
Comment un fumeur à l’hygiène de vie peu recommandable est-il devenu en sept ans l’un des meilleurs coureurs longue distance de l’Hexagone ?
Alcool, cigarettes… jusqu’au jour de son premier footing
Flashback en 2010, Yoann Stuck a 26 ans et vit à Avignon. Vendeur, Yoann se nourrit tous les jours de pizzas et burgers. Depuis les cours d’EPS (éducation physique et sportive) à l’école, il n’a pas pratiqué beaucoup de sport non plus.
« J’avais une vie active, je travaillais, je fumais, je buvais, raconte t-il aujourd’hui. Je gagnais de l’argent et je me fichais du reste. » Et puis, un jour, « j’avais tellement la gueule de bois, que je ne savais plus où j’avais garé ma voiture », confie-t-il.
Yoann Stuck décide alors de se prendre en main. Un matin, il enfile un short de foot, un tee-shirt en coton, sa paire de Nike Shox et s’en va courir en bas de chez lui. « Je venais d’arrêter de fumer et je faisais 90 kg, fallait que j’évite d’atteindre le quintal… »
Sa première séance ne dure que vingt minutes mais c’est un supplice pour le jeune homme. « J’ai couru à 10 kilomètres à l’heure, j’étais crevé à la fin… et pourtant, j’ai quand même pris du plaisir. » La fois suivante, Yoann Stuck augmente la cadence. 25 minutes, 30 minutes… et il se sent de mieux en mieux. Le sport l’aide à combler son manque de la cigarette
Inscrit dans un club, il gagne ses premières courses
« En parallèle, j’ai commencé à boire moins d’alcool. » Yoann fait aussi plus attention à son alimentation. « J’ai découvert ce qu’était une vraie soupe ! » Boosté par sa rapide progression, le nouveau coureur s’inscrit aussi en salle de sport. « Comme je perdais du poids avec la course, je devais me muscler. »
Quelques semaines plus tard, Yoann Stuck s’inscrit à sa première course, le Run In Lyon. Verdict ? 44 minutes 59. Pas mal, trois mois après son premier footing. Quelques temps plus tard, Yoann rejoint un club. « J’ai découvert que je m’entrainais mal, j’ai suivi les conseils qu’on me donnait, j’ai commencé le fractionné. L’émulation du club m’a motivé, j’ai commencé à enchaîner les courses… »
Lors de ses premières participations, Yoann Stuck termine en milieu de classement. Puis petit à petit, il intègre les top 20, puis les top 10… jusqu’à remporter sa première course, fin 2012. Suivent des podiums nationaux et des manches de Coupes de France. Yoann a vite progressé vite grâce à sa motivation et parce qu’en parallèle, sa vie a pris un nouveau tournant.
« Je suis allé vivre à Lyon avec ma compagne donc je faisais des courses à pied pour découvrir la ville. » La très bonne hygiène de vie de celle qui partage sa vie l’aide à tenir la cadence. « Quand j’ai commencé à courir, je voulais juste voir ce que ça donnait. Et ça fonctionnait, donc j’ai essayé de passer des caps. Ensuite, chaque nouveau résultat m’a motivé à aller encore plus loin… »
Une envie de « performer » tout en restant « épicurien »
Après avoir longtemps été vendeur, Yoann Stuck court, travaille comme coach sportif et est soutenu par des sponsors. « Être à mon compte n’est pas facile, mais je préfère travailler beaucoup et m’épanouir dans ma passion que de passer moins de temps dans un emploi qui ne me passionne pas. »
Derrière sa longue barbe, ses piercings et ses tatouages, Yoann Stuck se sert de sa vie d’avant comme un moyen de relativiser. « J’ai commencé la course à 26 ans sans formation en athlétisme. J’ai douté sur mes capacités à être entraîneur et ça fonctionne pas mal. Ca montre qu’avec de la détermination, tout est possible. »
Pour l’avenir, Yoann Stuck souhaite à la fois « performer » et voyager grâce à la course à pied. Il rêve d’aller courir en Sibérie ou d’explorer la campagne du Japon en baskets. « J’ai envie de découvrir de nouvelles personnes, de nouvelles mentalités, des styles de vie différents ».
À 33 ans, Yoann Stuck aime ce qu’il est devenu. Mais le Yoann de 2010 n’a pas disparu. « Hier, j’ai regardé un match de foot et j’ai bu une bière. Je reste quand même assez épicurien… »
Tiré d’un article de Ouest-France, Mercredi 20 juin 2018