Une étude belge quantifie les années d’espérance de vie perdues lorsque l’on fume. Mais aussi les années d’incapacité en fin de vie… Un scénario noir que les fumeurs peuvent enrayer en arrêtant la cigarette.
Rappelez-vous, 2006.
Tout ce qui s’est passé dans votre vie depuis cette année-là, les gens croisés, aimés, perdus, la carrière, les voyages, la famille, des enfants peut-être… Huit ans d’existence. Si vous fumez, sachez que vous faites probablement une croix dessus. Car la cigarette coûterait en moyenne huit années de vie, selon une récente étude de l’Institut scientifique de santépublique (ISP), un centre de recherche fédéral belge.
Les scientifiques ont travaillé sur les données récoltées lors de deux enquêtes nationales de santé, en étudiant les décès survenus chez les répondants aucours des dix années suivantes. Que le tabac tue, ce n’est pas une surprise. Mais le travail de l’ISP est très précis sur le calendrier et met aussi en évidence une autre conséquence du tabagisme, moins souvent avancée et étudiée : la probabilité de perte d’autonomie dans la vieillesse.
D’une dépendance à l’autre
C’est bien simple, les fumeurs risquent en moyenne de vivre six années de plus que les non-fumeurs le calvaire redouté de « l’état d’incapacité » : difficultés à accomplir une des six tâches quotidiennes listées (s’asseoir ou se lever, s’habiller, rentrer ou sortir du lit, manger…), incontinence, troubles sensoriels ou encore difficulté à se déplacer. Autrement dit le fumeur connaîtra plus tôt et plus longtemps que les autres une vie diminuée. « Fumer entraîne entre autres des insuffisances respiratoires, des insuffisances cardiaques, des accidents vasculaires cérébraux… confirme la docteur Muriel Anguenot-Fiol, médecin addictologue et vice-présidente du regroupement national des addictologues libéraux (Addictolib). Ce sont ces troubles qui entraînent la perte de l’autonomie et les incapacités. »
De manière a priori un peu curieuse, on apprend que les ex-fumeurs vivent moins d’années malades et dépendants que les non-fumeurs. Mais pas de miracle là-dessous, juste des statistiques : si les ex-fumeurs qui ont vaincu leur addiction sur le tard souffrent moins des affres pathologiques de la vieillesse, c’est parce qu’ils sont morts… plus vite que les non-fumeurs. Pour arriver à ces conclusions toujours moins réjouissantes, les chercheurs ont considéré que les individus étudiés, qui avaient au moins 30 ans, étaient tous des fumeurs de longue date. Ils sont partis du principe que, passé la trentaine, il était peu probable de s’y mettre : on ne sait donc pas ce qu’il advient des fumeurs qui commencent tard.
Reste que les auteurs de cette étude insistent sur la « nécessité absolue d’inciter tous les fumeurs à tourner définitivement le dos au tabac ». Et pour ça, il n’y a pas d’âge, ni de raison meilleure qu’une autre, même si on ne craint ni la mort ni la dépendance. La docteur Anguenot-Fiol se souvient de sa plus vieille patiente : « Une dame de 88 ans. Elle a voulu arrêter de fumer à cause de son perroquet. La vétérinaire lui avait expliqué que l’animal souffrait d’insuffisance respiratoire, causée par la fumée de ses cigarettes ! »